LA GALLURA AUTOUR DE TEMPIO

PAYS ET LIEUX DE MONTAGNE ET MER

par Alberto La Marmora

Itinéraire de l’Ile de Sardaigne

 Turin 1860

Chez les Frères Bocca, Libraires du Roi

en italien: 

par Google Earth
Autour de Tempio on voit les villages voisins, d’Agius, Nuches, Luras et Calangianus, ranges en cercle à une distance à peu près égale de la ville. Ces quatre villages, avec ceux de Bortigiadas, de Terranova et de S. Teresa, sont les seuls que renferme le vaste territoire de la Gallura. Toutes les autres populations de cette province, sans compter celles des îlots voisins, sont éparses dans des Stazzi ou espèces de bergeries isolées, groupées entre elles sous le nom de Cussorgie.
coll. Gianfranco Serafino - Aggius
coll. Oliviero Maccioni - Bortigiadas
coll. Oliviero Maccioni - Nuchis
coll. Oliviero Maccioni - Luras
coll. Oliviero Maccioni - Calangianus
D’après le rév. Victor Angius ces populations consisteraient en près de 188 Cussorgie, qui se subdivisent en 1560 Stazzi, ou familles.

Les Cussorgie sont ensuite en grande partie réunies en Cappellanie (chapellenies) où paroisses rurales auxiliaires. Ces paroisses sont maintenant au nombre de huit. Leur institution date du ministère du célèbre comte Bogino; il en existait alors cinq.

Les prêtres qui les officiaient avec le titre de vice-parroci n’y résidaient que pendant une partie de l’année, et ce n’est que depuis fort peu de temps qu’ils y sont fixés à demeure. On doit celle disposition au Vicaire général du diocèse, le chanoine chevalier Muzzetto, et au dernier Intendant de la Province, chevalier Orrù, qui imposèrent également à ces ecclésiastiques l’obligation de tenir une école élémentaire pour l’instruction des enfants de leurs Cussorgie. Le ministère de l’instruction publique assigna une somme pour l’entretien de ces écoles, de façon que l’on a pourvu à l’instruction religieuse et civile de ces populations jusqu’ici délaissées.

par Giacomo Sanna
par Giacomo Sanna
Il faut espérer que ces bonnes dispositions porteront leur fruit, et qu’elles influeront sur les mœurs et sur la conduite de tant d’individus épars sur ce vaste territoire, où les inimitiés et les vengeances ont bien souvent armé les familles les unes contre les autres, sans que la force publique ait pu y apporter un remède efficace; aussi les Gallurais ont-ils eu jusqu’ici la réputation d’être indociles et même sanguinaires. Je dois dire cependant que ces habitants sont revenus de l’horreur que leur inspirait naguère le service militaire; depuis que la loi de la conscription a été mise en vigueur dans l’Île, il y a peu d’années (1851), ils s’y sont soumis de bonne grâce; les réfractaires sont aussi rares parmi eux que chez les autres Sardes.
Pittaluga-Levilly - berger de Gallura, 1826
Lorenzo Pedrone, berger de Gallura, 1841
Depuis une quarantaine d’années, et surtout depuis que les fromages de l’Île se vendent moins à l’étranger, les bergers de la Gallura se sont donnés peu à peu à l’agriculture; aussi l’on voit maintenant autour de leurs Stazzi des champs, même très-étendus, cultivés à blé; en quelques lieux on a planté avec succès la pomme de terre, qui vient très-bien dans un sol sablonneux comme celui de la Gallura, formé par la décomposition du granité; enfin on y pratique avec avantage l’extraction de l’écorce du liège qui est l’arbre le plus propre à cette région. Malheureusement des spéculateurs étrangers ont entièrement dévasté dans cette province les arbres de cette espèce, qu’ils ont achetés du Gouvernement et des particuliers presque pour rien, et après en avoir tiré l’écorce ils les ont brûlés pour avoir de la potasse. Il faudra maintenant des siècles pour réparer cet acte de vandalisme, dû à l’insouciance de l’administration; il y a cependant lieu d’espérer que l’importance de ce précieux arbre sera mieux appréciée et que dorénavant on en protégera la plantation et l’entretien.

Tout ce que je viens d’exposer sur la nouvelle phase dans laquelle entre cette contrée, jusqu’ici négligée et abandonnée, m’engage à croire que la civilisation ne tardera pas à y faire des progrès.

par Aurelio Candido
par Aurelio Candido

Luogosanto

En sortant de Tempio pour sa rendre à Santa Teresa, et à l’île de la Maddalena, on suit d’abord un seul chemin jusqu’à un lieu nommé Luogo Santo, qui se trouve a cinq heures de marche à cheval loin de la ville. On nomme ainsi cette localité parce qu’elle fut jadis habitée par deux hermites, S. Nicolò et S. Trano, qui, d’après ce qu’en ont dit les historiens de l’île, s’y seraient établis dans le V siècle.

coll. Vittorio Ruggero
Philippine de La Marmora - L'ancienne église de N. Signora près de la capitale de la Gallura
En effet, outre l’église principale, dédiée à la Nativité de la Vierge Marie, on voit en cet endroit deux chapelles sous le patronage de ces deux saints personnages; elles existaient déjà du temps de l’historien Fara qui dit: et «Loci Sancti ubi sacrae aedes Beatae Mariae et Sancti Nicolai et Sancti Trani adhuc cernuntur. On trouve près de ces églises quelques Stazzi groupés ensemble, formant une espèce de bourgade, ou plutôt un embryon de village, qui tend a s’accroître, et ou réside une station de Carabiniers.

On y voit également des espèces de boutiques semblables è celles que j’ai signalées à Saint-Leonard de Santu-Lussurgiu et en d’autres localités; elles servent aux vendeurs qui s’y rendent et y tiennent une foire, à l’occasion de la fête de la Patronne et de celles des Saints mentionnés ci-dessus; ces fêtes attirent toujours beaucoup de monde en ce lieu.

par Marianna Pilo - Église de San Trano
par Roberto Gamboni - église de San Leonardo

Isola Rossa et Vignola

De Luogo Santo partent deux chemins, celui de gauche qui conduit au village de Santa Teresa et celui de droite que l’on parcourt pour se rendre vers la Maddalena. Ils traversent tous les deux un pays fort accidenté et boisé, dont le sol est granitique. Pendant ces deux trajets de quatre longues heures de cheval, on ne voit rien qui soit digne d’être mentionné; c’est pourquoi je vais passer à la description de la côte de la Gallura.

Cette côte commence à l’ouest, par la rive droite du fleuve Coghinas, non loin du château Doria; de-là, en suivant le littoral, on trouve d’abord un îlot granitique, sur lequel est une tour, que l’on nomme Torre dell’Isola Rossa, à cause de la couleur de la roche qui la supporte.

Ce lieu est connu dans l’histoire de l’île parce que c’est là qu’abordèrent, en 1674, le malheureux marquis de Cea et ses compagnons, attirés dans un guet-apens par un faux ami; les soldats Espagnols, appostés près de là, tombèrent à l’improviste sur ces imprudentes, dont plusieurs périrent les armes à la main; leurs têtes furent mises sur des piques et portées ainsi en triomphe jusqu’à Cagliari, à travers toute la Sardaigne. Elles furent ensuite exposées pendant longtemps dans une cage de fer placée à la tour de l’éléphant, conjointement avec celle du marquis de Cea.

Celui-ci, moins heureux que les autres, fut garrotté et conduit à la capitale, ayant toujours l’affreux spectacle des tètes ensanglantées de ses amis, qu’on portait devant lui; ce tourment ne finit que lorsqu’il fut décapité lui-même sur la Piazzetta de Cagliari, comme il a été dit en son lieu.

par Michela Simoncini
par Rob 07
par Evgeniy Ursalov
Plus au nord de la tour de l’isola rossa, on rencontre celle de Vignola, qui parait marque l’emplacement de l’ancienne station de Viniolis, indiquée dans l’itinéraire d’Antonin, comme la première étape, à partir de Tibula, sur la route Romaine de l’ouest de l’île.
par Gianni GDO
par Marianna Pilo

SOURCES D’ILLUSTRATIONS

Dessins, peintures et lithographies du siècle XIX (certains sous-titres sont traduits librement)

Alessio Pittaluga, Berger de la Gallura, ca 1826, IN Royaume de Sardaigne dessiné sur les lieux. Costumes par A. Pittaluga [lit. gravée par Philead Salvator Levilly], Paris – P. Marino, Firenze – Antonio Campani, 1826, rist. Carlo Delfino 2012.

Lorenzo Pedrone, “Berger de la Gallura“, ca 1841, IN Luciano Baldassarre, Cenni sulla Sardegna, illustrati da 60 litografie in colore, Torino, Botta, 1841; Torino, Schiepatti, 1843 (rist. Archivio fotografico sardo, 1986, 2003).

Philippine de La Marmora, “Basilique de Notre-Dame de Luogosanto et Gallura”, 1854-1856, IN Luigi Piloni, Memorie sulla terra sarda: tempere inedite di Philippine de la Marmora (1854-1856), Cagliari, Fossataro, 1964.

Cartes postales et photos, fin du 19ème / début du 20ème siècle

collezione Gianfranco Serafino; Vittorio Ruggero.

Oliviero Maccioni IN 

Photos contemporaines

Giacomo Sanna; Aurelio Candido – Flickr; Marianna Pilo – Flickr; Roberto Gamboni – Flickr; Michela Simoncini, CC BY 2.0 – Flickr; Rob 07 – Flickr; Evgeniy Ursalov – Flickr; Gianni GDO – Flickr.

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